Le malheur de Bruch, c'est d'avoir compose un Premier Concerto pour violon particulièrement réussi, promis à une renommée universelle et qui a causé un tort terrible aux deux suivants. Le Troisième, de 1890 en est très éloigné. Par les dimensions d'abord, avec plus de 38 minutes, il se rapproche du Concerto de Brahms; mais surtout par le contenu. Ici, Bruch voit tout en grand; non sans une certaine solennité mais avec toujours beacuoup de lyrisme et, si l'on écoute les détails, bien de la délicatesse. Quoique peu joué, ce Concerto a été assez souvent enregistré, et compte plusieurs versions de grande qualité: Accardo/Masur (Philps), Hanslip/Brabbins (Warner), Ehnes/Dutoit (CBC Records); Mordkovitch/Hickox (Chandos).
Dédiée à Sarasate, comme la Symphonie espagnole de Lalo, la Fantaisie écossaise, antérieure de dix ans, est nettement plus connue. C'est une page séduisante, de forme libre mais d'une composition aussi sérieuse que les concertos, qui a davantage tenté les ténors du violon (si j'ose dire) comme Heifetz, Oistrakh, Grumiaux ou Perlman. Comme souvent dans ces collections consacrées par Hyperion aux concertos romantiques, le soliste est peu connu en France. Jack Liebeck, professeur à la Royal Academy of Music, est un interprète de grande qualité, plus soucieux de mettre en lumière les finesses de l'écriture de Bruch, dans un dialogue très subtil avec l'orchestre que de faire des effets de manche et de brio. Il voit juste car derrière les formes amples et un peu académiques du concerto et les traits de virtuosité attendus se dissimule un joli dialogue entre le soliste et l'orchestre. Martyn Brabbins est très attentif à la qualité de ce dialogue, et sait (également), dans les tuttis, lâcher la bride à un orchestre souvent éperdu de lyrisme.