Un vieux sociétaire de la Comédie française a qui ses collègues n’osaient pas dire que sa fille, jeune pensionnaire, n’avait pas le talent paternel, sentant le verdict sur le point de tomber, lâcha un «Je sais, je sais, que voulez-vous, le génie n’est pas héréditaire» demeure célèbre dans la maison de Molière. On ignore ce que Wolfgang, mort quatre mois après la naissance de Franz Xaver aurait dit de celui-ci, mais on est sûr d’une chose: le fiston était très loin d’avoir le génie de papa, ni même le métier qui lui permettait de s’exprimer sans entraves, mais il avait appris le sien auprès de Salieri et de Hummel. Assez prodige pour faire ses débuts viennois a quatorze ans, Franz Xaver préféra rapidement vivre loin des intrigues. Il enseignera a Lemberg, aujourd’hui Lviv (en Ukraine), ou il fila le parfait amour avec une élevé, formant avec le mari de cette dernière un ménage à trois qui fit faire la moue a Constance, fixée à Copenhague.
Ses deux concertos valent par leur bonheur mélodique et leur orchestre aéré. Les idées s’enchainent vite, juxtaposées plus que développées. La musique avance pimpante, virtuose. Et ça marche! A condition de ne pas en attendre un vingt-huitième concerto de Mozart, ni ce que Beethoven composait en 1809 et 1818, années des deux présents concertos. Ni même un Mozart d’avant le « Jeunehomme ».
Le Concerto en ut majeur écrit par Muzio Clementi a la toute fin de la décennie 1780 (il le recyclera dans sa sonate pourpiano op 33 nº3), est moins riche mélodiquement, un peu plus court, moins charmant, moins intéressant jusqu’au finale ou le compositeur laisse enfin éclater une verve humoristique bienvenue.
Howard Shelley et l’orchestre de Saint-Gall jouent de façon précise, enjouée, avec un entrain que nulle ombre ne vient tourmenter plus d’une fraction de seconde. Un petit supplément de vigueur n’aurait pas nui.