Un petit maître ? Ah non !, William Sterndale Bennett est au contraire, à égalité avec John Field, le grand homme du premier romantisme anglais, le seul compositeur d’Albion dont les œuvres puissent sans pâlir se faire entendre aux cotés de Mendelssohn, son modèle, son ami avec lequel il partageait l’enthousiasme de la redécouverte de Bach dont il ressuscita la Passion selon St. Matthieu pour le public londonien.
Schumann l’admirait, Parry, Sullivan furent ses élèves, il détermina l’avenir de la musique nationale britannique, paradoxe ! lui dont les œuvres se coulent avec tant d’évidence dans le grand concert du romantisme germanique. Jamais bavarde, toujours poétique, son écriture pour le piano trouve avec l’orchestre une dimension imaginaire qui s’échappe du salon : ce sont des paysages, des échos de chasse, tout un imaginaire qui parfois se teinte d’un rien de fantastique, comme si Füssli venait peindre par-dessus ses notes.
Howard Shelley, qui avait déjà gravé le 4e Concerto (et nous doit donc encore le 5e, un prochain album les réunira peut-être y ajoutant quelques pièces plus brèves), fait vibrer les teintes délicates et les mélodies évocatrices des trois premiers concertos, œuvres des débuts où passe l’imaginaire, entre Mozart et conte noir d’un Weber. Il les joue avec une imagination certaine, réglant de son piano où des personnages paraissent, où se nouent des intrigues, un orchestre qu’il équilibre avec subtilité, si bien que ce premier Romantisme s’anime, incroyablement présent, si séduisant.
Disque magnifique qui rend justice à un vrai maître.